A La Rochelle on débat sur l’Art comme expression du féminisme

Pour la journée internationale de lutte pour les droits des femmes, l’université de La Rochelle a organisé un café-débat sur le féminisme et ses expressions à travers l’art qui fait écho à la 9ème édition du festival Des elles à La Rochelle. Un festival qui s’empare de la ville tout le long du mois de mars, pour mettre en avant les femmes à travers de nombreuses expositions, des débats, des rencontres, des ateliers…

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    Pour la journée internationale de lutte pour les droits des femmes, ce jeudi 8 mars 2018, plusieurs femmes se sont regroupées à l’entrée de la Bibliothèque Universitaire de La Rochelle pour débattre en public de la double notion d’Art comme expression du féminisme. En présence de Salomé Ruel, adjointe à l’égalité femme/homme à la mairie de La Rochelle, modérée par deux enseignantes de l’Université, Roselyne Niel et Élodie Chazalon, se trouvaient un savant mélange de profils d’artistes, maniant supports et techniques divers et variés : Marie Monteiro, photographe, Françoise Mamolar, documentariste, Juliette Gauvrit, artiste brodeuse, Lola Merlier, illustratrice, et Solenne Gros de Beler, chargée d’action culturelle. Sans surprise, le public était composé d’une écrasante majorité de femmes bien que quelques hommes, compagnie éparse et maigrichonne, se soient joints à l’audience pour communiquer sur le sujet.

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Café-débat sur le féminisme devant la Bibliothèque Universitaire de La Rochelle le 8 mars 2018 avec Marie Monteiro, photographe, Françoise Mamolar, documentariste, Juliette Gauvrit, artiste brodeuse, Lola Merlier, illustratrice, et Solenne Gros de Beler, chargée d’action culturelle encadrées par Roselyne Niel et Élodie Chazalon, enseignantes. © Sianourse

Comment définir le féminisme ?

     Attrapant au hasard et au vol les auditeur-trices, à la sortie de la bibliothèque, captivant ceux et celles qui s’étaient déjà distribué les places face à la scène arrangée pour l’occasion, la première question est lancée : « Mais en fin de compte qu’est-ce que le féminisme pour vous ? » Autant dire que l’interrogation a occasionné autant de réponses variées que de personnes présentes. Ce qui en ressort, c’est que le féminisme est avant tout une forme d’engagement individuel, personnel et intérieur que chaque femme mène au quotidien. Quelle femme ne s’est jamais demandé si elle était bien féministe ? Comment savoir si nous le sommes ? Peut-être que pour répondre à cette question, il faut tout simplement analyser ce qui nous meut. Sentons-nous concerné-e-s par le rôle et l’impact des femmes ? Par le droit à disposer de nos corps ? Par la question de l’égalité des salaires ? Par la violence qui subsiste envers les femmes ? Alors qu’est-ce qu’être féministe au fond, si ce n’est réaliser que nous portons un intérêt à la place de la femme dans notre société et défendre un principe fondamental, celui d’égalité ?

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Salomé Ruel, adjointe à l’égalité femme/homme à la mairie de La Rochelle donne son avis. © Sianourse

Des droits à sauvegarder et d’autres à conquérir

     La problématique soulevée par les invitées et qui semble tourmenter l’auditoire reste cependant celle de l’héritage de ces droits acquis et des combats qui restent encore à mener. Une femme d’une cinquantaine d’années est intervenue sur le fait que les droits fondamentaux avaient été acquis pour la plupart et qu’il était nécessaire de poursuivre ce que les aînées avaient commencé. Car, si de nos jours, la lutte n’est plus « vitale » comme elle l’a été dans les groupes de prise de conscience des années 1970, tel un devoir de mémoire envers celles qui nous ont précédé-e-s, à nous de veiller à ce que nos droits soient préservés, et à ce que notre statut soit le même que celui des hommes. Et de ce côté, il reste encore du travail.

     Une question de place sociale s’impose ainsi d’elle-même : où en sont les femmes ? Pourquoi alors que 60% des étudiant-e-s de la FEMIS, grande école de cinéma, sont des femmes, seulement une seule d’entre elles a recueilli jusqu’ici un césar en réalisation ? Pourquoi la plupart des postes à haute responsabilité dans le domaine de la culture sont occupés par des hommes ? Dans le domaine de la culture : 84 % des théâtres cofinancés par l’État sont dirigés par des hommes, 78 % des spectacles ont été mis en scène par des hommes. On observe également qu’une dirigeante sur dix considère encore que le fait d’être une femme a constitué un obstacle dans l’accès à sa fonction alors que la question n’effleure pas les hommes. Quant aux  réseaux professionnels la même question revient  : pourquoi est-ce que seuls les hommes semblent s’y retrouver ?

     Tout n’est donc pas fait, et il y a encore beaucoup à faire pour obtenir gain de cause. De plus, c’est très certainement les stéréotypes qu’ils nous restent avant tout à déconstruire. Des idées toutes faites concernant les genres, des réflexions comme celles du type : « Ah bah tiens t’es une fille, qu’est-ce que tu fais là ? », entendues plusieurs fois  par Marie Monteiro lors de concerts qu’elle couvrait. Dans ce cas, l’art permet-il de transcender ces déterminismes pour enfin nous en détacher ? Nous pourrions aussi nous pencher sur la représentation de la femme dans le monde… Car s’il existe une pluralité de femmes, il en résulte une pluralité de causes.

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Café-débat sur le féminisme devant la Bibliothèque Universitaire de La Rochelle le 8 mars 2018. © Sianourse

Artiste avant d’être femme

    Mais, le féminisme c’est aussi apprendre à s’ouvrir à la communication entre hommes et femmes pour accéder à un esprit de collaboration : « je refuse de rentrer dans un combat, je fraternise » dit encore la photographe. Doit-on différencier l’artiste homme et l’artiste femme ? La créatrice ou le créateur est artiste avant d’être homme ou femme. «Il y a des artistes et des paroles, ajoute une des invitées. Bien qu’ille puisse défendre une thèse en lien avec le genre, cela ne devrait pas rentrer en compte ».

      Pourtant à une époque, les regards se sont portés sur les hommes, seuls, et le fait d’être une femme a apporté une manière autre de regarder l’art, de se l’approprier pour défendre une cause, pour « hurler en silence » – comme l’a si bien brodé Juliette Gauvrit –  à travers l’espace et le temps par la peinture, l’écriture, la sculpture et tant d’autres moyens d’expression. Louise Bourgeois n’a jamais revendiqué son féminisme pourtant son œuvre a été interprétée comme telle du fait qu’elle portait en son sein la vision d’une femme sur son temps. Ce qui ressort de ce débat c’est que les femmes artistes aspirent à obtenir une place légitime auprès des hommes, sans pour autant vouloir à tout prix leur voler la vedette, mais tout simplement réussir à être sur un pied d’égalité.

Et pour parfaire cette journée internationale de lutte pour les droits des femmes, la ville de La Rochelle organise le festival Des elles à la Rochelle, proposant toutes sortes d’activités culturelles afin de mettre les femmes artistes à l'honneur jusqu'au 31 mars 2018. Par ici le programme !

Un commentaire sur « A La Rochelle on débat sur l’Art comme expression du féminisme »

  1. Super article ! La question de l’affirmation du féminisme dans la création revient à choisir entre « l’art pour l’art » et « l’art comme engagement », on ne peut pas vraiment trancher, c’est avant tout une question de sensibilité.

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