Dorothy Aubert a co-fondé avec Marie Trébaol Belleville Editions pour donner la parole à des autrices et auteurs dont les œuvres sont peu traduites. Une maison d’édition engagée, qui publie plusieurs fictions féministes.

Quelle est la ligne éditoriale de votre maison d’édition ?
Dorothy Aubert : « Nous voulons donner la parole aux personnes qu’on entend moins. Il existe par exemple beaucoup d’auteurs turcs, beaucoup sont traduits, mais ce sont surtout des hommes et issus de l’intelligentsia, pas des gens du peuple, peu de femmes turques sont traduites. Nous souhaitons ouvrir une fenêtre sur le monde, sur les cultures que l’on voit moins, essayer de donner la parole aux minorités.
Nos livres abordent un pays à partir d’une thématique sociale, politique… Nous avons aussi une ligne de romans féministes du monde. On se tourne beaucoup sur l’Amérique latine, le Moyen-Orient, ou encore l’Europe de l’Est. »
Comment votre maison d’édition s’est-elle créée ?
Dorothy Aubert : « Nous sommes éditrices avec Marie Trébaol, donc nous connaissions déjà le fonctionnement d’une maison d’édition, nous avions déjà un réseau d’agents, etc. Le lancement de notre maison d’édition, en 2015, a été possible grâce à un crowdfunding de 6.000 €. Celui-ci permettait de commander notre premier livre, La Coiffure de la Mariée de l’autrice turque Seray Şahiner. Ce sont des portraits de femmes de l’Istanbul moderne, avec des destins différents. Cette autrice est engagée auprès des minorités et donne dans ce recueil la voix aux femmes turques de tous horizons. Avant cette première publication, je suis partie en voyage deux ans pour récolter des idées. »
Comment trouvez-vous les livres que vous traduisez et éditez ?
Dorothy Aubert : « En voyageant, on découvre des choses, on se rend sur place, on essaie de déchiffrer un territoire qu’on lit moins. Quand je suis à l’étranger, je parle aux libraires, et leur demande quel-le-s auteurs et autrices sont important-e-s, et ensuite je remonte le fil pour trouver un-e interlocut-rice-eur.
Souvent on nous donne des extraits en anglais qu’on peut consulter. On juge donc l’intérêt d’un livre sur un synopsis et une dizaine de pages. On s’engage donc souvent davantage par rapport à l’univers d’un-e autrice/auteur que par rapport à l’histoire en elle-même.
La première année, nous n’avons édité qu’un seul livre, puis nous sommes passé à 4 livres par an, nous en avons donc publié un total de 9 pour l’instant. »
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Quels seront vos prochains livres publiés ?
Dorothy Aubert : « Le dernier livre qui a été publié s’appelle La ville en fuite, écrit par Jean-Chat Tekgyozyan, un auteur arménien qui est une des plus grandes voix de l’Arménie aujourd’hui. Il raconte l’histoire d’un jeune homme qui a déménagé en France, car il est trop compliqué d’assumer son homosexualité en Arménie. C’est un roman plein de poésie, à deux voix, avec en trame de fond un amour impossible.
En mars 2019 nous sortirons un livre slovaque, car Bratislava est à l’honneur du prochain salon du livre de Paris. C’est un roman très littéraire et onirique qui raconte l’histoire d’enfants qui vivent avec leur mère et décident de partir à l’aventure.
Avant l’été 2019, nous publierons également un recueil de portraits de femmes par une autrice colombienne. Une autre collaboration est prévue avec une autrice féministe syrienne. »