72 Avenue, un média d’empowerment contre l’islamophobie

Nouveau-né dans le paysage des médias numériques indépendants, 72Avenue.fr propose aux lecteur·trices de découvrir des récits de personnes discriminées sous l’angle de l’empowerment. Les paroles de concerné·e·s ont alors pour vocation d’inspirer et libérer. Interview de sa fondatrice Meye Mando.

72 avenue
Capture d’écran de la page d’accueil de 72Avenue.fr.

Peux-tu nous présenter 72 Avenue ?

Meye Mando : « 72 avenue est un nouveau média en ligne que j’ai créé en janvier 2018. Il a pour objectif de parler de toutes les discriminations sans aucune distinction, on y aborde donc les discriminations religieuses, raciales, sexuelles… Ce qui est nouveau, c’est de traiter ces questions avec un angle positif en racontant des histoires de personnes discriminées ayant réussi à surmonter les obstacles liés à des discriminations pour atteindre leurs objectifs. »

L’islamophobie est un sujet qui te tient à cœur, pourquoi ?

« Durant mon parcours j’ai été moi-même discriminée, principalement à cause de mon voile, surtout pendant ma recherche de stage en journalisme. Je me souviens que la secrétaire de direction de mon école de journalisme m’avait clairement dit « Meye personne ne veut de toi parce que tu es voilée », alors que j’excelle dans mon domaine et que j’ai été major de ma promo. C’est une phrase qui m’est restée en tête. J’ai donc voulu me battre pour atteindre mon objectif et montrer que ce n’est pas parce que je porte le voile que j’en suis incapable. Un voile ne fait pas de vous une abrutie. Je veux dire aux personnes discriminées qu’on peut réussir, même si c’est plus dur. On peut le faire. »

Quelle est l’importance d’un média comme 72 Avenue aujourd’hui ?

« Je pense qu’on a tou·te·s besoin d’un modèle, d’un exemple à suivre. Constater qu’on n’est pas seul·e à être victime d’une discrimination, mais aussi que certain·e·s personnes arrivent à s’en sortir, c’est encourageant, cela veut dire qu’on a tou·te·s la possibilité de réussir. Ce média essaie de donner des clés pour surmonter les obstacles, même s’il faut parfois mettre les bouchées doubles, on peut être fière de ce que l’on est et réussir. Je trouve que les médias ne parlent pas assez d’islamophobie, le sujet est souvent mal traité. C’est un réel problème, on doit être éduqué·e·s tou·te·s ensemble contre l’islamophobie, comme on l’est toujours contre l’antisémitisme et la xénophobie. Je ne sais pas pourquoi on a peur de parler d’islamophobie en tant que discrimination contre les personnes de confession musulmane ou assignées comme tel. »

Les Françaises musulmanes subissent des discriminations à plusieurs niveaux : sexisme, religion, racial… Comment ces femmes y font-elles face ?

« Quand vous êtes une femme française, de confession musulmane avec une origine maghrébine ou arabe, alors oui, vous avez plus de chance d’être discriminée.
On y fait face en se disant que chaque femme est comme toutes les femmes, comme tous les hommes qui réalisent leurs objectifs. On avance, on essaie de ne pas se décourager face aux obstacles. Je sais que c’est difficile, mais je sais qu’il ne faut pas donner raison aux autres, surtout pas. »

Pour toi quels sont les outils qui existent pour se défendre contre ces discriminations en France ?

« Il existe plusieurs associations défendant les victimes, notamment les femmes musulmanes, comme le CCIF et Lallab. Le plus important est de ne pas s’isoler. Il faut se rapprocher des personnes qui ont aussi été victimes de discriminations pour qu’elles comprennent qu’elles ne sont pas seules, et qu’elles ne seront jamais seules. Tu n’es pas la première, et tu ne seras certainement pas la dernière. Il est important d’aller dialoguer avec des personnes victimes de discrimination pour comprendre comment celles-ci ont réussi à atteindre leur but, et comment elles ont passé outre ces obstacles. Le gouvernement a mis en place des outils pour lutter contre les discriminations existantes, je ne connais pas leur efficacité, mais pour moi, le meilleur recours reste les associations qui défendent vraiment les victimes. »

72 avenue va-t-il se développer ?

« Je voudrais faire quelque chose de grand. J’aimerais une version papier de 72 avenue mais le coût est très lourd, et le marché de la presse assez compliqué. Donc je prévois plutôt de lancer des émissions web. »

Cet article a été publié dans le premier numéro de notre revue papier féministe, publié en septembre 2018. Si vous souhaitez l'acheter, c'est encore possible ici.

Publié par

Que tout se vive avec passion.

Laisser un commentaire